« Et alors, ton roman, ça avance ? »
Aujourd’hui on parle de manuscrit interminable, de ceux qui dorment dans les tiroirs, des doutes constants et des interrogations qui parasitent nos nuits.
« Et alors, ton roman, ça avance ? »
« Mon quoi ? »
« Ton roman, ‘fin ton manuscrit, t’as avancé comme tu voulais depuis la dernière fois ? »
« J’ai quoi ? »
« Est-ce que t’as… ouais, bon, OK, j’ai compris. J’arrête. »
Clément tire une longue taffe de sa roulée pendant que je ricane.
J’attrape une frite de patate douce, la plonge dans le pot de mayonnaise au cumin et la dévore d’une seule bouchée. Puis une deuxième, une troisième, une quatrième et après j’arrête de compter. Mastiquer m’aide à me concentrer sur autre chose que sur le stress qui me noue l’estomac.
J’essaie d’oublier qu’on a abordé le sujet qui fâche, là, au milieu des autres clients.
Et pourtant mon estomac se pince encore et encore.
C’est qu’un manuscrit, putain. On va pas en faire un drame.
Mon oreille droite se promène à la table voisine. Deux nanas à la voie éraillée discutent des 70 slides d’une pres’ qu’elles ont eu à modifier en “last minute” juste après “le call”, une sombre histoire qui implique un “connard de client” pour un “déo bio qui sent le foin, MAIS SI, je te jure que c’est le foin que ça sent” parce que « qu’est-ce qu’il nous emmerde à nous faire retravailler la baseline 4 fois de suite pour revenir à la première version… ET SI, JE TE DIS QUE CA SENT LE FOIN ».
À gauche, c’est un date ou peut-être que ce n’est pas un date, juste lui qui parle beaucoup et qui fait de grands gestes avec ses bras parce qu’il a bu trop de bière tandis qu’elle, elle préfère écouter ou qu’elle est gênée par toute la place qu’il prend. De toute manière, il ne lui a pas posé de questions depuis qu’ils se sont installés. Y a juste lui qui parle et qui mouline des bras. J’arrive pas à savoir s’ils viennent de se rencontrer ou s’ils se connaissent et ça m’intrigue parce que je veux savoir pourquoi elle est là, avec cette hélice sur pattes. Il l’a même pas laissé finir les frites de patates douces et c’est quand même un sacrilège, date ou pas date. Il aurait pu demander “tu veux finir les frites?”, faire semblant d’être poli. Mais non. Il mange, il parle et il mouline.
À sa place je lui aurais fait la gueule.
En plus ça me changerait les idées de mon manuscrit.
Je laisse Clément engloutir les dernières frites pendant que j’attaque les mozza sticks.
Depuis qu’on est arrivés, la terrasse a eu le temps de se remplir et les néons de s’allumer. Le brouhaha joyeux et festif qui s’élève des tables est couvert par la pluie drue qui tombe en faisant « ploc ! » « ploc ! » sur l’auvent rétractable. Elle finit par former des rigoles au point qu’on voit à peine le reste de la rue et les voitures qui circulent ne sont plus que de grosses tâches floues de couleurs sombres seulement éclairées par leurs phares.
C’est joli.
« C’est quand qu’il arrive Corentin ? »
« ‘Sais pas, il est en retard. Le boulot. Il se dépêche. »
« Cool. Ça nous forcera à changer de sujet. »
Un frisson me parcourt de la tête aux pieds. J’ai froid sauf que ce n’est pas la faute du froid.
J’ai froid parce que j’ai chaud, parce que je me sens fiévreuse, fébrile.
Tout ça à cause d’un putain de manuscrit.
Et le pire c’est que ça me met de mauvaise humeur. Et le pire c’est que je sais que Clément le sait parce qu’il me lance son sourire crispé qui sous-entend que si j’étais un animal, je tiendrais plus du roquet que du gentil toutou. Le petit chien pénible qui vient te choper le bas de pantalon et qui tire dessus jusqu’à le déchirer parce qu’il a décidé qu’aujourd’hui c’était un jour sans alors que d’habitude c’est que des jours avec,
mais quand c’est sans eh bien il faut faire avec.
« Désolé, dit Clément. Viens, on change de sujet. »
« M’okay. »
« Bon. T’as lu quoi récemment ? »
« AH NON, ON PARLE PAS DE LIVRES, CA ME FAIT PENSER A L’ECRITURE. »
Soupir.
Nouvelle taffe de cigarette.
Je glousse.
« On recommande des frites ? »
Aborder l’avancée de mes manuscrits, ce n’est jamais une science exacte. C’est même la roulette russe.
Depuis mes premiers écrits (je ne parle pas professionnels, je parle d’il y a bien avant), je n’ai jamais été à l’aise pour raconter ce que j’écrivais. Même lorsqu’il ne s’agissait de rien de personnel, comme par exemple les rédactions et les dissertations. Peu importe l’âge que j’avais, je prenais toujours un soin particulier à planquer mon brouillon pour que mon voisin/ma voisine soit incapable de lire une seule ligne de mon travail. J’avais cette sensation étrange que si je n’étais pas dans une bulle hermétique, seulement confrontée à moi-même, alors je perdrais « le flow1 », que la facilité avec laquelle j’écrivais finirait par se dissoudre, que la bulle éclaterait et que tout tomberait à l’eau.
Cette superstition ne m’a jamais vraiment quitté.
J’ai toujours besoin de m’isoler pour créer.
Ceci explique ma nervosité lorsqu’on me demande de présenter/montrer mes travaux d’écriture. Peu importe si ce n’est qu’une infime partie, peu importe que les feedbacks prennent en compte que je ne suis qu’à mi-parcours, je suis persuadée que la moindre brèche risque de créer une intrusion qui viendra briser mon flow. Cette sensation me terrifie, c’est pour ça que je me transforme en harpie au moindre risque de fissure.
Ces dernières années, j’ai essayé plusieurs fois de partager sur les réseaux sociaux des morceaux de ces travaux en cours, mais je gère tellement mal que je finis par abandonner. J’ai beau prendre toutes les précautions pour éviter de me transformer en cocotte-minute « c’est un premier jet, ne faites pas attention aux défauts » « l’idée n’est que de vous partager quelques indices pour vous donner envie de lire », la moindre interaction maladroite finit par me crisper et me donner envie de tout envoyer valser2. Alors je fais l’extrême inverse et je me transforme en ermite : circulez, y a rien à voir tant que ce n’est pas terminé à la virgule près.
Oh, bien sûr que mes insécurités jouent un rôle là-dedans.
Si je protège mes mots derrière une forteresse jusqu’à les juger suffisamment satisfaisants pour les laisser sortir, c’est bien parce que je les trouve encore trop souvent fragiles et vacillants.
J’ai peur que le moindre souffle ne les torde, ne les brise, qu’ils soient impossibles de les réarranger et que tout finisse à la poubelle, avec mes mains en sang et plus que mes yeux pour pleurer.
Je perçois la moindre bourrasque comme une tempête qui s’annonce.
J’avais déjà noté cette citation dans une précédente lettre, mais elle tape si juste que je la réécris par plaisir coupable : « She was an artist, like you. With a —I don't know how to say this well— an ego that is large but self-esteem that is small? » Cleopatra & Frankenstein de Coco Mellors.
C’est tout de même absurde, un artiste.
On créé une œuvre, on laisse mûrir en nous quelque chose qui grandit, grandit, grandit, qui se transforme en sentiment d’urgence qu’il faut consigner sur le papier qu’on gratte, gratte, gratte. Ce truc avec des contours pas tout à fait définis qui sort de nos tripes et alors, cette chose-là, qui est au fond une part de nous (peu importe laquelle, qu’elle le soit explicitement ou non), on la donne à des inconnus. On la livre au grand jour, on la partage, on la dépose quelque part et on laisse les gens la découvrir à leur tour pour s’en faire un avis.
On les laisse tourner autour, la toucher, la pétrir, la percevoir à leur manière, l’interpréter à leur façon, l’abîmer un peu parfois, d’autres fois la trouver encore plus belle que ce qu’on lui trouve parce qu’avec le temps notre propre regard change à son sujet… et des fois c’est même nous qui finissons par l’amocher.
Et on fait tout ça parce que ça nous anime.
Parce que ça nous fait vibrer.
« Tu sais, la dernière fois j’y pensais, à ton boulot. J’ai réalisé que les livres que t’écrivais étaient lus par des gens qui pouvaient en penser ce qu’ils veulent sans que tu n’aies le contrôle dessus ou ton mot à dire… alors que c’est un bout de toi, quand même ! Ca m’a fait bizarre, comme sensation, alors je préfère même pas imaginer ce que ça te fait à toi, m’a dit une fois mon amie Elodie au téléphone. »
J’ai acquiescé.
La plupart du temps, moi-même je sais pas ce que ça me fait.
Plus de bien que de mal, je suppose.
Alors en attendant le moment où mon roman n’est plus vraiment mon roman, mais qu’il devient une aventure extraordinaire et aussi pleine d’incertitudes (celle où des lecteurs et lectrices peuvent se plonger dedans), je me raccroche à l’adage « vivons heureux, vivons cachés » et j’écris à l’abri des regards.
Les moments où je sors de mon mutisme sont souvent le signe que mon manuscrit a passé une nouvelle étape : un blocage qui m’empêchait de dormir la nuit et qui a (enfin !) sauté, une envolée fulgurante qui me fait poser un regard plus bienveillant que d’habitude sur mes propres capacités et parfois, tout simplement, la F I N, le point final qui est posé sur le document et que j’observe avec satisfaction. Avec toujours la même pensée :
Comme la fois précédente et celle encore d’avant, j’ai cru que je n’y arriverais pas ou alors pas aussi bien, mais apparemment j’aime jouer à ce petit jeu-là, celui de m’auto-persuader que je n’y arrive plus et au final, j’y arrive.
Pas toujours de la même manière et rarement en suivant le même sentier, mais le fait est que le point final est arrivé à destination.
Ces moments sont rares et précieux et je les savoure à chaque fois.
Garder tout à double tour à l’intérieur de soi pendant des mois finit par peser lourd, surtout quand les mots s’accumulent et que les pages s’empilent les unes sur les autres. J’aimerai tellement réussir à parler de mes manuscrits avec plus de légèreté et d’enthousiasme. J’envie celles et ceux qui donnent pleins de détails, qui livrent des morceaux qui deviennent des pans entiers, qui n’ont pas de pudeur à ce sujet car pour eux les enjeux sont ailleurs, que leur histoire n’a pas besoin d’être couvée en secret.
De mon côté, je vis l’écriture dans mon coin, je fais partie des autrices qui s’isolent… Je suis seule face à mon document, la seule à le relire dans tous les sens, à l’endroit comme à l’envers Je suis celle qui étale les mots, mais aussi celle qui tranche dans le vif. Le bourreau et la victime en même temps. Autant vous dire qu’il y a des périodes où je suis aussi aimable qu’une porte de prison suivant le regard que j’ai posé sur ce que j’ai écrit. 💀
Dernièrement, ce que j’ai fait me paraissait tellement mauvais que j’ai capitulé3….Deux choix s’offraient à moi : arrêter de souffrir à force d’être convaincue que mon texte était mauvais OU le montrer à quelqu’un qui aurait un œil critique, mais aussi extérieur et plus juste et qui me dirait honnêtement ce qu’il en était. A 30 ans, on devient sage et j’ai donc mis mon ego de côté pour le deuxième choix.
Puisque j’ai toujours aimé me confronter à des situations inconfortables (🤡) et que cette lettre est l’occasion de le faire, laissez-moi vous dire clairement où j’en suis dans l’écriture de mon manuscrit.
Pardon d’avance pour les personnes qui y verront un doublon avec des lettres déjà écrites puisque j’ai longuement parlé de mes projets d’écriture de cette année en juin4 ainsi qu’à mon retour en septembre5 . Je vais donc faire un rapide récap chronologique histoire de perdre personne en cours de route, afin qu’on comprenne bien de quel manuscrit il s’agit puisque, pour celleux qui ont suivi (et s’en souviennent !), la rédaction de mon travail d’écriture actuel n’est ni simple ni linéaire.
Si vous voulez avoir plus de détails, je vous invite à parcourir celle de juin qui explique la méthode d’écriture (très personnelle) que j’ai appliqué, qui a très bien fonctionné, mais que j’ai finalement abandonné.
L’idée de la chronologie ci-dessous est de faire le point afin de vous rappeler que la rédaction de chaque manuscrit est différente. C’est la première fois que je fais autant de pauses et d’allers-retours durant la rédaction d’un manuscrit. D’habitude, je fonctionne plutôt en one-shot : je ponds un premier jet un peu barbare et hautement perfectible, puis je le retravaille une fois que tous les mots sont posés. Mais pas cette fois : sa densité m’intimide tellement que je fonctionne par partie (4 au total).
1er trimestre 2024 : la cour de récré 🪀
Janvier 2024 > je rédige le plan détaillé de deux projets de romans complètement différents. Je n’ai signé aucun contrat en maison d’édition car cette fois-ci, je veux d’abord écrire pour moi, sans pression et sans deadline pour souffler un peu. Tant pis si j’échoue et si ce que je fais ne trouve pas preneur, j’ai besoin de retrouver une forme de plaisir innocent et naïf pour me dépasser et pour tenter de nouvelles choses !
Je me lance donc dans
1) un roman de young-adult fantastique qui parle de dragons
et 2) un thriller pour adultes qui parle de tennis
Les deux projets me plaisent et compte tenu de mes capacités de travail et de concentration que je commence à bien connaître, je décide de les écrire en simultané.
Février 2024 > je me lance dans la rédaction des deux manuscrits en même temps. 15 jours l’un puis 15 jours l’autre. Ça fonctionne plutôt bien.
Mars 2024 > je me lasse ! 15 jours c’est trop long entre chaque manuscrit. je décide d’alterner d’une semaine à l’autre. Ça marche du tonnerre, je suis ravie, j’écris sans m’arrêter. 🚀
2er trimestre 2024 : trois heures de colle 😒
Avril 2024 > je commence à fatiguer… parce que le travail, parce que la vie de bureau, parce que la vie tout court, parce que j’écris beaucoup. Beaucoup. Je suis au total à presque 70 000 mots (35 000 pour le roman YA sur les dragons, 30 000 pour le thriller sur le tennis). Sauf que ça tire, tire, tire et dans la vie, il faut savoir faire des choix, apprendre à freiner avant de se prendre un mur. Alors je décide de me focaliser sur le roman YA qui est celui où je suis la plus à l’aise.
Mai 2024 > le thriller dort donc dans un tiroir tandis que le roman YA sur les dragons avance bien. 35 000 mots viennent s’ajouter aux 35 000 précédents. Un joli score de 70 000, ce qui n’est pas très loin que la taille de mon tout premier roman jamais écrit ! En à peine quatre mois d’écriture dont la moitié sur un autre projet, c’est propre.
Mais…
Maintenant que je suis dans la vif du sujet, je réalise aussi à quel point ce roman va être plus long que ce que j’avais prévu. Tout nécessite d’être développé, il y a des infos et des détails à disséminer un peu partout avant le twist final, bref je ne laisse rien au hasard et je passe tout au peigne fin… c’est vraiment dense.
Je pensais que le roman serait à peine plus long que mon dernier paru cet hiver (aux alentours de 110 000 mots), mais je réalise que je me suis trompée. Je table plutôt sur du 150 000.
Si après quatre romans à mon actif je ne me sens plus comme une débutante (ouf !), je suis loin d’être hyper expérimentée pour autant. Je continue de tâtonner, tester, de me découvrir dans mon écriture. Et pour la première fois en 4 ans, j’ai mal estimé mon temps de travail sur un de mes projets d’écriture… heureusement que je n’ai rien signé et que je n’ai aucune deadline officielle. 🫠
Juin 2024 > Je bloque.
Putain.
Je bloque.
Le mois de juin est un long désert de relecture, de réécriture sans trop y croire où tous les défauts me sautent aux yeux. Il y a des faiblesses, des incohérences et des longueurs… ah ben oui, ça on l’aura compris qu’il était LONG.
Et j’ai l’impression qu’on s’y perd, que c’est un bordel sans nom, un gros tronc d’arbres avec trop de branches et de racines et que les deux se mélangent au point ça fait des tas de nœuds dans ma tête. J’avance pas beaucoup, j’ai l’impression que mon texte m’a englouti et qu’il veut plus me laisser sortir.
C’est trop, y en a partout.
80 000 mots de doute.
Je suis découragée.
Et puis je me déteste de me relire désespérément en me posant 36 questions alors que je ne suis même pas fichue d’atteindre la fin de tout ce bousin. Le mois de janvier où je projetais d’avoir fini mon manuscrit avant l’été (et ENFIN vivre un été sans écriture) me semble bien loin et me fait doucement rire.
C’est à ce moment-là que j’envoie une bouteille à la mer pour trouver mon phare dans la tempête.
Fin juin, je fais relire les deux premières parties déjà rédigées (soit à peu près 30 chapitres) à une personne de confiance qui me connait suffisamment pour savoir comment me relire et quels retours me faire.
3ème trimestre 2024 : le conseil de classe 🎓
Juillet 2024 > En attendant les retours de ma relectrice, j’avance péniblement sur ma partie 3. Mes blocages ne sont pas vraiment partis et j’espère de toutes mes forces qu’elle saura me pointer du doigt ce qui ne va pas pour m’aider à me dépêtrer. Des fois je l’imagine me dire que tout est irrécupérable et je fantasme une version de moi qui fout tout à la poubelle et qui fait le deuil d’un texte dont elle est la seule à connaître la fin.
Ma relectrice revient vers moi au cours du mois et, bonne nouvelle, il y a pleins de choses positives. 🎉
Les faiblesses et points d’amélioration qu’elle relève font écho aux miennes et c’est un réel plaisir d’entendre quelqu’un d’autre poser des mots dessus, auxquels je n’avais même pas pensé pour certains ! Quel soulagement que de discuter et d’échanger avec une personne qui comprend ce que je veux faire et qui sait concrètement de quoi je parle puisqu’elle a lu le texte.🫶
Je retravaille la partie 1 en suivant ses retours. C’est bien moins fastidieux que la montagne que je m’étais imaginée.
Août 2024 > En août, je me replonge dans la partie 3. C’est aussi la période des JO et puis du mercure qui grimpe, grimpe, grimpe. Alors je laisse le temps me glisser dessus. J’écris en pointillés, mais j’écris (et c’est déjà pas mal !) et le manuscrit finit par atteindre le cap symbolique des 100 000 mots6. Je suis heureuse et en même temps ça me colle le tournis parce que… la fin est toujours loooin même si je m’en rapproche.
Ma relectrice revient vers moi avec la partie 2 qu’elle a fini d’annoter. J’avais beaucoup moins peaufiné cette partie que la première, donc je sais d’ores et déjà qu’il y a plus de travail. Ses retours m’aident à me replonger dedans et à repasser sur mon texte, à soigner mes phrases, à revoir la configuration de certaines scènes, leur ordre etc. C’est un travail de fourmi 🐜 et après 11h passées non-stop devant mon écran pour venir au bout, je décide de profiter de mes vacances et de ne plus toucher à ce fichu texte qui a déjà deux mois de retard.
Tant pis.
Septembre 2024 > En Vendée, j’écris. Ces quelques jours hors du temps me font beaucoup de bien.
Sur Instagram je publie ça, alors que je n’ai posté aucune photo depuis juin :
« Je trace cette histoire de jeunes adultes malheureux, parfois désœuvrés, qui n'ont connu que la violence et l'injustice. Je les fais cohabiter au milieu des montagnes où il fait froid de jour comme de nuit. Je les fais vivre parmi les dragons qui hurlent à la mort. Et j'essaie de raconter quelque chose qui me tient à cœur et qui, je l'espère, sera entendu, compris et partagé.
Parce que ce roman c'est ça, aussi, surtout : les douleurs qu'on enfouit tous au lieu de les vivre ensemble, car on s'est persuadé qu'on ne peut que les subir seuls ; oui, mais à quel prix. Et puis aussi les douleurs qu'on s'inflige et qu'on inflige à ceux qui n'ont rien demandé. »
Une mise en bouche de ce manuscrit dont j’ai si peu parlé ces derniers mois.
Ensuite c’est la rentrée.
Le 16 septembre j’ouvre mes documents qui approchent des 110 000 mots. Je les reparcours brièvement et je réalise que peu importe leurs défauts et mes doutes quant à leur sujet, je les regarde d’un œil presque… bienveillant. Ce recul m’aide à prendre conscience de leurs qualités, de mes progrès.
Tout ça n’est pas vain.
Je termine d’écrire la partie 3. Le manuscrit passe à 120 000 mots.
Tout ce que j’ai appris des 120 000 mots passés m’aide à y voir plus clair. Je commence à prendre des notes « dans la partie 1, il faudra que je rajoute ceci. Par contre dans la partie 2, il faudra clairement faire sauter ce passage. Et dans la partie 3, il faudra modifier ces dialogues pour les remplacer. »
Je me lance désormais dans la partie 4, que j’estime autour des 30 000 mots. Je revois le plan, je le simplifie, je le rends plus linéaire et cohérent.
Cette fin que j’attends d’écrire depuis janvier.
J’ai hâte parce qu’elle me plaît cette fin.
J’y crois.
Elle fait sens.
Je n’écris que pour elle et seulement pour elle. Cette fin que j’attends depuis des mois. Cette résolution qui me tient en apnée.
Ensuite il y aura la relecture, les corrections, traquer les répétitions, les incohérences. On n’y est pas encore.
Lister ce qui devra être décidé à tête reposée, un peu plus tard, quand j’aurais soufflé. On n’y est pas encore non plus.
Le bout du tunnel, je le vois. Il est si loin, toujours.
Mais je crois que ça prend forme.
Je crois que je suis fière de moi.
(Les prénoms de Clément et Corentin ont été modifiés.)
Pauline en parle mieux que moi dans sa lettre “Atteindre l’état de flow créatif” ;)
“Ce que je vois chez mes voisins”, février 2024
“5 leçons apprises cet été et bric à brac de l’été”, septembre 2024
“J’ai trop écrit et donc j’en ai eu marre”, juin 2024
“5 leçons apprises cet été et bric à brac de l’été”, septembre 2024
Chez moi, il y a deux cap symboliques : les 80 000 mots (la taille de mon tout premier roman terminé et publié) et les 100 000 (parce que c’est beaucoup ok ? Y a CENT dedans, donc c’est forcément beaucoup).
J’ai adoré cette lettre ! Est-ce que tu as déjà pensé à te lancer dans le contemporain? 👀
Juste une chose : j’adore te lire, même quand on ne fonctionne pas pareil. De mon côté, j’ai besoin de partager très vite ce que j’écris, de tester la réaction des gens face à mes ambiances, mon pitch ou mes personnages. Ça me galvanise et me motive à avancer. Et pourtant, tes mots font échos à certaines de mes angoisses, donc merci pour ça ❤️