đEcrire une newsletter pendant un an : ce que jâai appris et ce quâil me reste Ă apprendre
On y est !!! Ma newsletter a un an aujourdâhui. đ Joie Ă©motion, fiertĂ© : le temps est passĂ© si vite et en mĂȘme temps, je rĂ©alise tout le chemin parcouru depuis la premiĂšre lettre que jâai envoyĂ©e...
âŠCar des changements, il y en a eu ! Alors voici tout ce que je voulais partager avec vous, que vous dĂ©cidiez de lancer votre propre newsletter ou de rester seulement du cĂŽtĂ© de la lecture.
Je ne me souviens que vaguement du moment oĂč jâai rĂ©alisĂ© que je voulais lancer une newsletter. Il y a eu plusieurs Ă©lĂ©ments qui se sont accumulĂ©s et qui ont fini par me convaincre que lâheure Ă©tait venue pour moi de tenter lâaventure, mais il nây a pas eu de moment prĂ©cis. LâidĂ©e sâest ancrĂ©e lentement, mais durablement dans ma petite caboche. Ă lâimage du dĂ©veloppement dâune newsletter, au fond.
En rĂ©alitĂ©, je me suis tenue Ă lâĂ©cart de ce format pendant longtemps,. Pour moi, newsletter rimait (et rime encore trop souvent) avec du spam, des offres promos Ă gogos dâeshop auxquels je ne me suis jamais inscrite et qui mâenvoient quand mĂȘme leurs m*rdes. Et les quelques newsletters auxquelles je mâabonnais (pour me donner bonne conscience et me sentir « à la page ») finissaient irrĂ©mĂ©diablement par tomber aux oubliettes.
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Mon changement dâopinion sâest opĂ©rĂ© lorsque je me suis inscrite sur lâappli Substack qui promettait de centraliser toutes les newsletters auxquelles je voulais mâabonner (et qui sont rĂ©digĂ©es depuis la plateforme, of course) sans rien recevoir dans ma boĂźte mail. Je trouvais ça formidable et beaucoup moins envahissant et jâai donc commencĂ© Ă en lire de cette maniĂšre. Je suis encore abonnĂ©e Ă quelques lettres de personnes qui ne passent par Substack, mais jâavoue que le confort de lâappli change beaucoup la donne.
Lâalgorithme de Substack est encore un peu maladroit, mĂȘme sâil sâamĂ©liore de semaine en semaine. Il ne comprend pas toujours que nope, dĂ©solĂ©e, je ne suis pas bilingue en espagnol et peut-ĂȘtre que cette lettre a rĂ©coltĂ© 600 likes, mais je ne suis pas fichue de la lire !! ; ou encore que, vraiment, merci mais non merci, je nâai pas besoin de conseils pour acheter 15 apparts qui me permettront de cumuler une rente de 8000⏠par mois en faisant trimer des locataires pour quâils mâenrichissent jusquâĂ la fin de mes jours parce quâaprĂšs 15 ans de bullshit job dĂ©nuĂ© de sens, la seule alternative qui existe doit ĂȘtre un slow life individualiste et capitaliste qui bĂ©nĂ©ficie toujours aux mĂȘmes (cet exemple est vĂ©ridique, jâen ai encore des palpitations).
Mais cet Ă©tĂ©, jâai eu le plaisir de dĂ©couvrir de nouvelles newsletters absolument formidables aux sujets passionnants et aux angles hyper intĂ©ressants (je vous les partage en toute fin de lettre, jâai renoncĂ© Ă les glisser Ă la fin de mon bric Ă brac estival qui Ă©tait dĂ©jĂ trĂšs Ă©toffĂ©). Jâai souri en voyant bon nombre de nouveaux inscrits profiter de leur Ă©tĂ© et du ralentissement de juillet pour Ă©crire leurs premiĂšres lettres, avec souvent beaucoup dâenthousiasme et dâexcitation⊠et puis disparaĂźtre en aoĂ»t, sans doute pris par le tourbillon des vacances. Ils ne sont pas revenus pour la rentrĂ©e scolaire (mais de nouveaux inscrits, dĂ©sireux de profiter de lâĂ©lan dâinspiration quâoffre souvent septembre ont pris leur place) et ils ne reviendront sans doute pas⊠et je nâen suis pas Ă©tonnĂ©e.
Parce quâaprĂšs un an dâĂ©criture Ă un rythme assidu, jâai conscience de tout ce que nĂ©cessite comme efforts et comme application de tenir une newsletter suffisamment rĂ©guliĂšrement pour obtenir des rĂ©sultats. Je ne parle pas forcĂ©ment de rĂ©sultats quantitatifs (mĂȘme si on y reviendra), mais aussi et surtout de rĂ©sultats qualitatifs (on y reviendra aussi, puisque câest ça qui permet de se diffĂ©rencier, au final).
AprĂšs ĂȘtre restĂ©e dans les gradins pendant quelques semaines Ă lire les newsletters des autres avec envie, jâai dĂ©cidĂ© de me lancer en septembre 2023. Le premier numĂ©ro devait paraĂźtre au tout dĂ©but du mois, et puis ma rentrĂ©e nâa Ă©tĂ© quâun tourbillon de travail, de to do list interminables et de stress du matin au soir. Finalement, le 20 septembre, je communiquais officiellement sur ce nouveau projet, avec une vidĂ©o que jâai publiĂ©e sur Instagram et sur Tik Tok et qui existe encore. Trois jours plus tard, jâenvoyais ma premiĂšre lettre, toute pleine dâapprĂ©hension et stressĂ©e. Mais trĂšs heureuse et fiĂšre de ce nouveau projet.
Depuis, je nâai jamais arrĂȘtĂ©, sauf cet Ă©tĂ© oĂč jâai finalement dĂ©cidĂ© de prendre une pause de huit semaines qui nâĂ©tait pas prĂ©vue suite Ă lâambiance politique aussi pesante que dĂ©primante. Mais de fin septembre Ă dĂ©but juillet, jâai rĂ©digĂ© consciencieusement plus de 25 lettres. De septembre Ă janvier, je me suis tenue Ă un rythme de deux lettres par mois, ce qui Ă©tait dĂ©jĂ un beau challenge. Et puis dĂ©but janvier, aprĂšs quatre mois Ă tĂąter le terrain, je me suis rendue compte que ce nâĂ©tait pas suffisant pour vous raconter tout ce que jâavais envie de vous raconter (jâatteins dĂ©jĂ souvent la limite maximale par mail et vous devez alors cliquer sur le bouton tout en bas du message pour la lire en entier dans une page web1 đ) et je suis passĂ©e Ă trois lettres par mois.
Encore plus de challenge, mais encore plus de fun ! Parce que mĂȘme si câest beaucoup de boulot, je ne gagne pas un rond avec cette newsletter (câest bien pour ça que vous pouvez la lire gratuitement, hĂ©) et donc câest avant tout par plaisir que je la gĂšre.
Les raisons qui me poussent Ă autant aimer tenir cette newsletter nâont pas changĂ© depuis le lancement, ce sont les points que jâaborde dans ma vidĂ©o de lancement (qui a atteint quasiment 100 000 vues, donc je soupçonne que mes observations sont partagĂ©es par un paquet de monde) et qui reviennent dans ma premiĂšre lettre =
·      ArrĂȘter dâĂȘtre dĂ©pendante dâalgorithmes capricieux qui provoquent des boosts de sĂ©rotonine autant quâils nous frustrent et dĂ©priment
·      Ne plus ĂȘtre limitĂ©e par un nombre de caractĂšres et de slides qui forcent Ă tout synthĂ©tiser et Ă perdre en nuance et en dĂ©veloppement
·      Ne plus se plier à des formats, des sujets et des angles « vendeurs » que tout le monde reprend pour les oublier cinq jours aprÚs
·      Favoriser le temps long autant durant le temps de crĂ©ation que le temps de parution afin dâĂ©viter de tomber dans des automatismes chronophages qui ne font grandir et Ă©voluer personne
Cette newsletter a tenu ses promesses en mâoffrant tous ces avantages et jâen suis aussi heureuse que reconnaissante. Peu importe que je sois parfois fatiguĂ©e lorsque je me lance dans sa rĂ©daction (souvent le vendredi soir Ă 22h, aprĂšs une longuuuue semaine et comme vous le savez, il mâest parfois arrivĂ© de la boucler aux aurores tellement jâavais de choses Ă dire đ€), il est rare que je traĂźne des pieds pour lâĂ©crire. Ou alors, ça ne dure que quelques minutes, le temps dâouvrir mon fichier et de rĂ©aliser Ă quel point les mots glissent facilement sur le clavier. Ensuite, je me laisse enveloppĂ©e dans cette bulle rassurante : ici, câest ma chambre Ă moi et Virginia Woolf nâa quâĂ bien se tenir.
Je ne veux pas non plus vous faire croire que les newsletters sont un monde virtuel Ă part qui ne subit pas les mĂȘmes problĂ©matiques quâon retrouve un peu partout sur les rĂ©seaux sociaux. Sur Substack2 notamment, la question de la modĂ©ration de certaines de leurs newsletters sâest posĂ©e dans les mĂ©dias. Quant Ă lâappli, les utilisateurs adorent rĂ©diger des notes pour expliquer Ă quel pooooint leur fil dâactu serait mille fois plus intĂ©ressant, positif, feel good et passionnant quâun fil dâactu X ou Instagram. Moui. Sur Substack, il y a de tout, ce qui implique aussi des notes un peu creuses qui voient dans lâappli un nouvel eldorado type Linkedin bis (merci mais non merci) oĂč ce sera Ă celui qui poste le plus pour attirer le plus de nouveaux abonnĂ©s. Dâailleurs, il paraĂźt que Substack se tĂąte Ă dĂ©velopper le contenu vidĂ©o (oh god, please, no).
Et pourtant, il est vrai quâĂȘtre sur une plateforme qui privilĂ©gie un contenu long, dĂ©taillĂ©, fourni et qui se veut « riche » change la donne, au moins un peu. Je me sens plus rassasiĂ©e, souvent satisfaite du temps que je passe sur lâappli, et donc je finis par moins scroller. Sâil mâa fallu beaucoup de temps pour trouver des newsletters qui me correspondaient (autant en termes de sujets que de points de vue proposĂ©s) et que le contenu reste majoritairement anglophone (ça ne me dĂ©range pas, mais je peux comprendre que ce soit un frein), jâai dĂ©sormais mes petites habitudes.
Bref, câest tout bĂ©nĂ©f.
Il y a quelques mois, Margot mâa demandĂ© si je voulais partager en visio mes conseils pour dĂ©velopper une newsletter dâautrice.
Jâai Ă©tĂ© sincĂšre et je lui ai rĂ©pondu que je ne mâen sentais pas capable. Dâabord, parce que je nâai pas la fibre pĂ©dagogue quand il sâagit de parler longtemps devant un public. Il y a mon anxiĂ©tĂ© qui me joue encore des tours et jâai tendance Ă digresser, Ă avoir du mal Ă dĂ©velopper mes idĂ©es⊠au final mon propos manque de fluiditĂ© et donc de clartĂ©. Lâexercice mâest aussi pĂ©nible quâinconfortable et ça se ressent. Je laisse ça aux pros. đ€
Lâautre raison Ă©tait aussi beaucoup plus pragmatique : pour pouvoir donner des conseils pour Ă©crire une newsletter, encore faut-il avoir compris ce quâon fait. đ€Ą Et sur Substack, il y a encore des tas de choses que je ne comprends pas toujours. Je nâai pas honte de le dire, parce que câest aussi rĂ©vĂ©lateur de mon amateurisme (technique, mais pas seulement). Jâaime lâidĂ©e quâInternet, les rĂ©seaux sociaux et tout ce qui sâen rapproche, nâont pas Ă ĂȘtre occupĂ©s seulement par des pros. Bien sĂ»r que câest formidable de maĂźtriser toutes les facettes dâun sujet ou dâun passe-temps (le savoir, câest le pouvoir ! comme on dit), mais on a aussi le droit de se lancer mĂȘme quand on nây connaĂźt pas grand-chose. Il existe justement des plateformes pour ça, pour nous permettre de partager facilement, de susciter des Ă©changes sans avoir besoin de sâarracher les cheveux. Bien entendu, ce que je dis ici a des limites (Ă©thiques, notamment), mais quand on est dans ma position (dâavoir deux boulots qui bouffent beaucoup de temps), câest un soulagement de pouvoir Ă©crire et tenir une newsletter sans angoisser de devoir avoir le contrĂŽle sur tout.
Certaines parties du back-office de Substack restent obscures, je ne suis pas satisfaite de tout ce que je produis, jâidentifie assez mal pourquoi certaines choses fonctionnent mieux que dâautres. Bref, tout reste un peu flou, notamment parce que je nâĂ©cris pas une newsletter qui a un but prĂ©cis, avec une ligne Ă©ditoriale parfaitement dĂ©finie ou appartenant Ă une « niche », encore moins avec un objectif lucratif. Pour toutes ces raisons, elle est trĂšs personnelle, Ă mon image (enfin, Ă lâimage de ce que je veux partager et montrer en ligne) et la façon dont elle se dĂ©veloppe reste trĂšs organique et irrĂ©guliĂšre.
Je fais tout Ă lâenvers, mais voilĂ les leçons que je souhaite apprendre dans les annĂ©es Ă venir :
·      Ătre plus attentive Ă mes stats et globalement Ă toutes les datas qui remontent dans Substack
·      Utiliser tout le potentiel de la plateformes et ses diffĂ©rentes fonctionnalitĂ©s pour comprendre jusquâoĂč je peux aller
NĂ©anmoins, mĂȘme si je ne suis pas une pro, voici tout ce que je peux vous partager pour vous aider Ă dĂ©velopper votre propre newsletter. Car depuis le message de Margot, jâai quand mĂȘme pris un peu de recul et fait le point sur ce qui a fonctionnĂ© (ou non). Bien sĂ»r, câest trĂšs personnel. Comme je disais plus haut, cette newsletter ne cherche pas Ă dĂ©velopper un business et si câest votre but, il vous faudra chercher des conseils ailleurs.
đĄCâest peut-ĂȘtre la premiĂšre leçon Ă retenir : il nây a pas de newsletter type et il nây a donc pas « une » recette magique pour gagner des abonnĂ©s
Au mĂȘme titre quâil y a des sites qui parlent de tout un tas de sujets diffĂ©rents, quâil y a des comptes sociaux qui abordent des thĂ©matiques parfois opposĂ©es, toutes les newsletters ne se ressemblent pas et ne rentrent pas dans la mĂȘme catĂ©gorie. Sans surprise, si certains conseils (assez Ă©vidents) peuvent se rejoindre, certains codes resteront trĂšs spĂ©cifiques selon ce que vous abordez. Ce conseil sera donc assez similaire Ă un conseil quâon retrouve pour dâautres contenus extĂ©rieurs aux newsletters : apprenez Ă observer les newsletters que vous apprĂ©ciez et Ă comprendre pourquoi car câest la premiĂšre Ă©tape pour vous permettre dâidentifier ce qui fonctionne chez quelquâun afin de vous en inspirer. Cela demande du temps, de lire rĂ©guliĂšrement un contenu, de sâen imprĂ©gner, de le croiser avec dâautres contenus pour le comparer⊠Cependant, jâinsiste sur le fait que ça ne signifie pas de copier la voisine pour autant (le plagiat câest moche et ça finit toujours par se voir et donc Ă vous desservir)3.
đĄMon autre conseil sera tristement prĂ©visible et rejoint le prĂ©cĂ©dent : il faut ĂȘtre rĂ©gulier
Ne vous lancez pas dans une newsletter si vous prĂ©voyez de ne sortir quâun numĂ©ro tous les six mois et que vous espĂ©rez pourtant fidĂ©liser votre communautĂ© avec un rythme aussi faible. Câest trop peu. OK, il nây a pas besoin dâĂ©crire quasiment une lettre par semaine comme je fais, mais il faut vous fixer un objectif rĂ©aliste et raisonnable.
Pour quâon se souvienne de vous et de votre travail, il faut en parler rĂ©guliĂšrement. Or, mĂȘme si vous ne gagnez rien en Ă©crivant une newsletter, câest tout de mĂȘme du travail (certes gratuit et agrĂ©able) : celui dâĂ©crire pour partager vos mots avec dâautres personnes.
Donc, abordez le avec sĂ©rieux et pour lâaborder avec sĂ©rieux, il faut ĂȘtre rĂ©gulier. CQFD.
đĄCette rĂ©gularitĂ© est aussi ce qui vous permettra dâamĂ©liorer votre plume
Lorsque je dis que jâĂ©cris une newsletter trois fois par mois, en plus des romans que je publie (EN PLUS de mon travail de bureau, car bon, je suis un peu cinglĂ©e apparemment đ€Ą), on me demande si ce nâest pas « trop ».
Pas de panique, je suis bien organisĂ©e et jâadore cette bulle de respiration qui me permet dâavoir une occupation qui nâa pas « dâenjeux » (peu importe tout le temps que je mets Ă Ă©crire mes lettres, je suppose que vous comprenez que je nây porte pas le mĂȘme attachement quâĂ mes romans). NĂ©anmoins, câest aussi un formidable exercice.
Plus jâĂ©cris et mieux jâĂ©cris. LâĂ©criture peut ĂȘtre comparĂ©e Ă une activitĂ© sportive = pour sâamĂ©liorer, il faut sâentraĂźner. Il nây a pas dâautres choix que de pratiquer sans relĂąche. Et parfois, il faut savoir tester dâautres exercices pour gagner en puissance.
đââïžPrenons lâexemple de la natation : une nageuse olympique ne va pas seulement faire des longueurs pour amĂ©liorer ses performances, elle va aussi faire de la musculation Ă cĂŽtĂ© pour gagner en puissance. Câest la complĂ©mentaritĂ© de plusieurs activitĂ©s (mĂȘme si, bien sĂ»r, la nage restera au cĆur de lâentraĂźnement) qui donnera de bons rĂ©sultats.
JâĂ©cris chaque lettre avec beaucoup plus de fluiditĂ© et de facilitĂ© quâun chapitre de mes romans, ce qui est logique : le style nâest pas le mĂȘme, je ne suis pas en train de raconter une histoire et mon propos ne se suit pas sur plus dâune trentaine de chapitres (ce qui nĂ©cessiterait une certaine cohĂ©rence et rigueur). Et câest cette position confortable qui mâaide Ă gagner en assurance pour mon roman. Puisquâici ma plume est plus facile Ă manier et que je nâai pas de blocage, je peux bien plus facilement corriger/amĂ©liorer toutes les faiblesses et les petites pĂ©touilles stylistiques sur lequel mon Ćil accroche. Et forcĂ©ment, cela se rĂ©percute sur mes romans oĂč ces blocages disparaissent et me laissent toute la place pour me pencher sur ce que je trouve plus dĂ©licat/challengeant Ă Ă©crire.
đĄTenir une newsletter, câest aussi trouver sa voix (ou voie, ça marche aussi) Â
Jâai eu beaucoup de mal Ă choisir quelle tonalitĂ© aborder en dĂ©marrant cette newsletter. Et je tĂątonne encore. Sur Internet, « la voix » peut se matĂ©rialiser de plusieurs façons diffĂ©rentes selon le support quâon choisit. Ce quâil y a Ă retenir, câest quâelle est importante car elle permet de cerner la personnalitĂ© que vous souhaitez mettre en avant. Et forcĂ©ment, dans une newsletter, câest hyper important puisque vous transmettez des Ă©motions (ou du moins un point de vue) via votre Ă©criture.
Cette voix nâa pas besoin dâĂȘtre forcĂ©ment intimiste, ni hyper recherchĂ©e, ni impudique et encore moins ampoulĂ©e. Inutile dâen faire des caisses, mais elle doit ĂȘtre authentique et par-lĂ , jâentends quâelle doit vous correspondre. On doit pouvoir vous identifier en vous lisant, sentir que cette newsletter est diffĂ©rente parce que câest la vĂŽtre et que personne ne pourrait lâĂ©crire comme vous. On doit vous retrouver entre les lignes, on doit partir Ă votre rencontre car câest comme ça que la magie opĂšre.
Au final, ça ne change pas beaucoup dâun autre travail dâĂ©criture. Un bon travail journalistique doit aussi avoir une bonne plume, mĂȘme sâil ne rapport que des faits. Un essai est palpitant lorsquâil sort des styles aseptisĂ©s trop techniques qui sont malheureusement rĂ©currents. Un roman, mĂȘme quand il raconte une histoire complĂštement imaginĂ©e Ă des annĂ©es lumiĂšres de notre monde, doit nous donner envie de dĂ©couvrir le reste de ce quâun auteur/une autrice a Ă©crit. Parce quâau final, ce quâon cherche Ă travers les pages, câest lui/elle : son style, sa patte, sa signature.
Il y a quelques lettres dont je suis trĂšs fiĂšre (et dâautres moins, câest le jeu quand on Ă©crit rĂ©guliĂšrement). Celles dont je suis la plus fiĂšre sont celles oĂč jâai mis un bout de moi et oĂč jâessaie, par une expĂ©rience personnelle, de crĂ©er un lien avec la personne qui me lit. Je ne sais pas si ça marche toujours, mais jâessaie et câest le principal.
De septembre Ă dĂ©cembre, jâai fait pas mal de tests : jâai dĂ©diĂ© des lettres Ă des sujets trĂšs spĂ©cifiques, parfois avec une promesse dĂšs le titre, dâautres fois de façon plus nĂ©buleuse, et jâai fait des comparatifs pour voir ce qui marchait le mieux (de mon cĂŽtĂ© niveau Ă©criture, et aussi cĂŽtĂ© lectorat en suivant un peu mes stats). Cependant, je trouvais ces lettres encore trop longues et fouillies car je mĂ©langeais des sujets sur le temps court et dâautres sur le temps long. Lâensemble Ă©tait trop confus Ă mon goĂ»t.
Ă partir de janvier, jâai voulu « rubriquer » histoire de mây retrouver. Câest comme ça que jâai eu lâidĂ©e des lettres « bric Ă brac » qui me permettent dâaborder tout ce que jâai aimĂ© durant le mois passĂ© autant dâun point de vue culture que lifestyle. Câest une parenthĂšse un peu lĂ©gĂšre (enfin, ça dĂ©pend de ce que jây raconte) et que jâadore car elle me permet de garder une trace moins Ă©phĂ©mĂšre quâen stories Instagram. Câest aussi un fil rouge, un rendez-vous qui ne change pas qui devient une habitude. On sait ce quâon vient y chercher et on sait ce quâon va y trouver.
Une fois que jâai mis toutes les recos Ă part, jâai rĂ©alisĂ© que je pouvais consacrer chacune de mes lettres aux autres sujets qui me tenaient Ă cĆur. Jâai essayĂ© une structure un peu rigide (et assez rĂ©pandue) : parler de lâĂ©criture en gĂ©nĂ©ral (puisque câest ma passion numĂ©ro 1) et puis de mon Ă©criture (mon actualitĂ©, etc). Mais jâai fini par me sentir prisonniĂšre parce quâil y a tellement de sujets qui inspirent mon Ă©criture et qui mĂ©riteraient quâon noircisse des pages entiĂšres que câen Ă©tait frustrant.
Je ne sais plus exactement quand le changement sâest opĂ©rĂ©, mais je sais quâun jour jâai dĂ©cidĂ© dâaborder mes lettres comme une histoire. Ou plutĂŽt un rĂ©cit.
Ici, je veux vous raconter quelque chose. Ce qui mâinspire vient toujours dâune expĂ©rience personnelle : une dĂ©couverte, une observation, une rencontre, un Ă©vĂ©nement (triste, joyeux, traumatisant, beau), une interrogation.
Et je pouvais vous embarquer avec moi, vous en faire part, vous intĂ©grer dedans quâon dĂ©roule le fil ensemble.
Et ça a l'air de vous plaire.
Et de marcher.
Parce que câest ça qui me permettra de garder le lien avec toutes les personnes qui me lisent : peu importe pourquoi elles me lisent, comment elles sont arrivĂ©es ici, leur Ăąge/leur mĂ©tier/leur profil/leur(s) centre(s) dâintĂ©rĂȘt. AprĂšs tout, ma vie nâest pas plus passionnante que ça. Jâai 30 ans, je vis Ă Paris et jâĂ©cris des bouquins. VoilĂ , voilĂ . Si on peut Ă©ventuellement sâidentifier Ă moi, il y a des tas de raisons pour lesquelles on ne peut pas. Alors je ne cherche pas Ă ce quâon sâidentifie Ă moi, par contre jâaspire Ă ce quâon trouve des points dâaccroche et quâon ne les lĂąche pas.
Je nâai pas encore une complĂšte satisfaction de ce que jâĂ©cris, mais jâessaie au maximum de garder cet objectif quand je rĂ©dige une lettre. Je vais de plus en plus dĂ©velopper cet angle pour lâannĂ©e Ă venir et ça risque aussi dâinfluencer mes lettres « bric Ă brac » parce que câest la tonalitĂ© que jâaime le plus. Je ne suis mĂȘme pas sĂ»re que vous remarquerez le changement, mais moi je le sens, et câest le plus important.
Câest un exercice long et lent que de sâamĂ©liorer en Ă©criture. Et parfois, ça ne marche pas toujours, mais câest le jeu. Je nâattends pas dâĂȘtre satisfaite de tout ce que jâĂ©cris pour le publier (sinon, je publierais jamais rien). Par exemple, cette lettre que je suis en train de vous Ă©crire ne me donne pas entiĂšre satisfaction (elle nâa pas totalement la tonalitĂ© que jâaimerais, mais son contenu se veut aussi didactique, donc câest compliquĂ© de trouver le juste milieu), mais je suis quand mĂȘme contente de pleins de choses que jây ai Ă©crit (notamment sur les mots que je pose et les observations que jâen tire).
Ce dernier point est important parce que câest aussi un Ă©lĂ©ment Ă prendre en compte : Ă©crire une lettre, câest dĂ©livrer quelque chose Ă quelquâun. Ce « quelque chose » peut ĂȘtre une histoire, une expĂ©rience, un conseil, un bon plan, un bon moment, mais en tout cas, il y a une promesse qui nous attend Ă la fin de la lettre. Quand on Ă©crit, il faut avoir cet objectif en tĂȘte pour ĂȘtre certain de ne pas le perdre en cours de route. Un contenu trop creux et vide, rĂ©alisĂ© Ă lâarrache et qui ne dit pas grand-chose, câest dommage. Et le problĂšme, câest que ça peut arriver mĂȘme sans faire exprĂšs⊠parce quâon a du mal Ă se rappeler quâil faut se mettre Ă la place du lectorat, comme dans nâimporte quel message quâon rĂ©dige.
Câest pour ça que je suis aussi adepte de mes « wiki-how », des lettres trĂšs riches et Ă©toffĂ©es, oĂč on en ressort avec quelques outils pour crĂ©er de son cĂŽtĂ©. Je ne fais pas ces lettres trĂšs souvent car elles demandent beaucoup de temps de rĂ©daction et ce ne sont pas celles oĂč ma plume est la meilleure (jây travaille ok). Mais je sais quâelles apportent dâautres bĂ©nĂ©fices et quâelles sont intĂ©ressantes pour des abonnĂ©s car utiles. La lettre dâaujourdâhui en est un exemple.
đĄTenir une newsletter, câest faire lâĂ©loge de la lenteur
Parce quâon propose un contenu long, qui se lit « à part » (par mail, sur une appli) auquel on nâaccĂšde pas entre deux vidĂ©os LOL de 15 secondes, rares sont les croissances exponentielles. Encore plus dans le monde francophone oĂč les newsletters ne sont pas autant lues que celles de nos compatriotes anglophones (eh oui).
Cet Ă©tĂ©, jâai vu pas mal dâutilisateurs Substack comparer lâappli Ă un nouveau Myspace, un nouveau Tumblr ou mĂȘme aux blogs des annĂ©es 2000-2010. Jâai vu dâautres personnes comparer Substack Ă Pinterest parce quâelles ressentaient la mĂȘme satisfaction et tranquillitĂ© que lorsquâelles contemplent de jolies photos lĂ -bas. Je ne suis pas sĂ»re que ces comparaisons soient forcĂ©ment exactes, jây ai surtout lu la frustration de millenials qui ont connu une temporalitĂ© en ligne beaucoup moins enclavĂ©e dans des bulles informationnelles et moins influencĂ©e par les algos et qui en sont nostalgiques. Cependant, je comprends lâidĂ©e : quand on sâabonne Ă une newsletter, on cherche rarement Ă sâen abonner Ă 50.
Lire une lettre, câest souvent long, ça demande du temps, de la concentration et de lâimplication. On sâengage beaucoup plus quâen regardant une story Instagram.
ForcĂ©ment, la valeur dâun abonnĂ© dâune newsletter est bien plus importante et grande que celle dâun abonnĂ© Instagram (qui a lui-mĂȘme plus de valeur quâun abonnĂ© Tik Tok pour les mĂȘmes raisons, mais bon, ce nâest pas le sujet đ).
Si vous Ă©tiez habituĂ©s Ă avoir 10 000 abonnĂ©s sur Instagram et que vous espĂ©riez rĂ©colter le mĂȘme chiffre simplement en faisant la pub de votre newsletter sur vos rĂ©seaux sociaux, vous risquez de dĂ©chanter. Surtout si votre newsletter nâa pas de « promesse » ou dâaxe business prĂ©cis qui permettent dâactionner les leviers marketings classiques.
Je ne partage quasiment plus ma newsletter sur Instagram (en tout cas, avec beaucoup moins dâinsistance) parce que jâai fait le tour des personnes qui pouvaient ĂȘtre susceptibles de sây inscrire. Lors du lancement, Ă peu prĂšs 800 personnes se sont abonnĂ©es dans les heures qui ont suivi (sur 16 000 abonnĂ©s Instagram Ă lâĂ©poque environ, lorsque mon compte nâĂ©tait pas encore complĂštement Ă lâabandon đ€Ș). Dans les mois qui ont suivi, jâestime quâil y a environ 500 autres personnes qui se sont abonnĂ©es lorsquâelles ont rĂ©alisĂ© que cette newsletter nâĂ©tait pas seulement une lubie passagĂšre. Le reste sâest fait par le bouche Ă oreille (la base quâon nĂ©glige trop souvent), les recommandations Substack (un vrai levier Ă ne pas oublier) et les notes via le fil dâactu de lâappli.
Au total, ma newsletter est suivie Ă date par 2400 personnes et jâen suis trĂšs contente. Ce nâest pas extraordinaire ni exceptionnel, mais je trouve ça trop chouette. đ«¶Il mâarrive dâavoir des « pics » fulgurants qui viennent de je ne sais oĂč, mais jâĂ©vite de mâenthousiasmer car je sais quâil y a aussi beaucoup de curieux qui repartiront trĂšs vite. Tant pis, câest le jeu.
En Ă©crivant tout ça, je rĂ©alise tout ce que jâai compris des newsletter en douze mois. Alors peut-ĂȘtre que je me perds encore trop souvent sur Reddit pour essayer de comprendre certaines datas, mais je ne suis pas non plus trop Ă cĂŽtĂ© de mes pompes.
âïžLes newsletters que jâaime lire (abonnez-vous, câest un ordre !)
Quand jâai commencĂ© Ă mâabonner Ă des newsletters, je ne pensais pas que je prendrais autant plaisir Ă lire les mots de personnes que je ne connais quâĂ travers un Ă©cran et dont je ne vois pas le contenu tous les jours (on est loin dâune prĂ©sence quotidienne quâimpose Instagram par exemple, les relations parasociales sont donc plus limitĂ©es). Mais Substack, câest aussi un moyen de faire de chouettes rencontres.
Je pense notamment aux lettres de Pauline Mauroux dans sa newsletter Tchik Tchak, qui est scĂ©nariste et qui propose des conseils dâĂ©criture clairs, concis, concrets et avec une vraie valeur ajoutĂ©e. Le regard dâexperte quâelle pose sur cette discipline et le fait quâelle partage tout ça gratuitement me donne espoir dans ce quâInternet offre comme contenus.
Je pense aussi Ă celle de Louise Hourcade, dont les lettres mâont beaucoup motivĂ© Ă Ă©crire les miennes. Jâadore ses mots, sa maniĂšre de capturer le quotidien ou de sâinterroger sur certains sujets et de nous les partager.
Je lis aussi avec curiositĂ© les lettres dâAlexandre Courbin, qui rĂȘve de devenir auteur publiĂ©, et qui a toutes les qualitĂ©s pour le devenir lorsque je vois le recul quâil a sur ce quâĂ©crire nĂ©cessite.
Dans un autre registre, si vous avez besoin de conseils dâexperte ++ pour dĂ©velopper une newsletter (avec lâambition dâen vivre), ne manquez pas les lettres rĂ©guliĂšres de Emma Gannon sur le sujet : ce nâest pas le seul sujet quâelle aborde, mais elle en publie sur cette thĂ©matique Ă peu prĂšs une fois par trimestre, elles sont payantes, mais archi complĂštes et utiles.
Et puisque jâaborde le sujet des newsletters payantes, jâen profite pour reprĂ©ciser que ma newsletter nâa pas vocation Ă devenir payante. Peut-ĂȘtre quâun jour jây rĂ©flĂ©chirais pour des tas de raisons qui ne seront pas seulement dâordre pĂ©cunier, mais ce nâest pas son but premier et pas non plus son but final. Je sais, je reste trĂšs vague, mais je nâai pas grand-chose Ă dire de plus par rapport Ă cette question dĂ©jĂ revenue Ă plusieurs reprises. Elle est gratuite et Ă lâheure actuelle, ça me convient trĂšs bien. đ
Je vous le disais un peu plus tĂŽt dans cette lettre, mais jâai lu cet Ă©tĂ© beaucoup de lettres formidables sur Substack, en voici quelques-unes (sans ordre particulier) :
đŁDĂ©couverte par hasard un soir oĂč je scrollais lâappli, lâincroyable enquĂȘte de Anne Helen Petersen sur les sororitĂ©s et fraternitĂ©s de lâUniversitĂ© dâAlabama : Partie 1, Partie 2, Partie 3, Partie 4, Partie 5 (JE VEUX UNE SERIE TV MAINTENANT !)
Deux lettres en français (ça change !) :
Mais oĂč sont passĂ©es les bonnes sĂ©ries ? de Marie Telling
Wine politics : de ce quâĂ©crire sur le vin veut dire de Sand
Et pleins dâautres, sur des sujets trĂšs variĂ©s :
Why Reading Online Reviews Of Your Book Will Lead You Nowhere Good de Tom Cox
Notes on travel de Sofia Efthimiatou đ©·
When the collective taste doesnât include you de Corinne Fay đ©·
Art isn't allowed to take up space anymore dâAnnika đ©·
Iâm tired of scrolling toujours dâAnnika
The end of your extremely online era de Tommy Dixon
I regret whatâs in my camera roll de Totally Recommend đ©·
Becoming a meme ruined my life dâAnuhea
oh so you're a thought daughter now? should i call joan didion? de Sarah Cucchiara đ©·
girls being girls: girl hobbies, consumerism, and the 24-year-old teenager toujours de Sara Cucchiara
How the fđ°đžk is everybody living like this? de Azora Zoe Paknadđ
The culture you keep mourning is very much alive de Viktoriia Vasileva đ©·
I donât like the movies you like and itâs not personal dâAndrew Powers Â
The woman journalist industrial complex de Madison Huizenga
I always wanted to quit Instagram, then it quit me de Daisy Buchanan
On wanting more from fashion influencers de Viv Chen đ
I donât know what feminism means anymore de Sara Petersenđ
Iâm smart and I need everyone to know it de Luisa đ©·
In search of cool de Helena Aeberli
Câest le cas de cette lettre, btw !
Que se passe-t-il avec la plateforme Substack et les nazis ? A lire sur Numerama : https://www.numerama.com/politique/1597194-que-se-passe-t-il-avec-substack-et-les-nazis.html Â
Fun fact : quand jâai commencĂ© Ă Ă©crire cette newsletter, jâai remarquĂ© que plusieurs personnes utilisaient le mĂȘme type dâintroduction pour dĂ©buter leurs lettres. Pensant que câĂ©tait une rĂšgle implicite pour sâintĂ©grer Ă Substack, je lâai repris, avant de dĂ©couvrir que cela venait dâune seule crĂ©atrice qui trouvait assez frustrant quâon reprenne sa mĂ©thode !
Je dĂ©couvre ta newsletter depuis peu, qui, je dois dire mâinspire autant quâelle mâintimide. Tu as une trĂšs belle plume đȘ¶, jâaime beaucoup ton style. Jâai commencĂ© Ă Ă©crire sur Substack il y a prĂšs de 6 mois, et lâexercice dâĂ©criture est gratifiant : je trouve quâon progresse plutĂŽt rapidement :)
On sent la passion à travers ta lettre ! Franchement, je ne savais pas pourquoi je la lisais jusqu'au bout mais tu m'en as donné envie et je me sens plus apaisée !